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23 mai 2013 4 23 /05 /mai /2013 00:16

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R est un jeune zombie qui, malgré son statut de mort-vivant, bénéficie d'une vie intérieure suffisamment riche pour se raconter lui-même avec une ludicité remarquable. Il traîne à l'aéroport, s'est installé une petite maison dans un avion abandonné, et tente même d'avoir quelques interactions sociales avec ses congénères. Tout va s'accélérer lorsque, durant une partie de chasse aux cerveaux, R va avoir le coup de foudre pour une belle jeune femme du nom de Julie. Se pose cependant un souci majeur : elle est vivante, et pas lui.

 

Réalisateur, voilà cinq ans, de l'excellent All the boys love Mandy Lane, Jonathan Levine revient faire un tour dans le petite monde du cinéma de genre avec Warm Bodies, adaptation sur grand écran d'un roman signé Isaac Marion et que je mentionne juste pour faire mon intéressant puisque je n'en ai pas lu la moindre ligne. All the boys love Mandy Lane, c'était une sorte de slasher tendance teen-movie qui ne ressemblait ni à un slasher, ni à un teen-movie. Une oeuvre vraiment à part, nantie d'une ambiance unique et d'un traitement profondément singulier. Warm Bodies, c'est un petit peu la même chose, mais avec des zombies.

 

Avant que l'on m'en fasse le reproche, je m'empresse de le préciser : oui, bien entendu, Warm Bodies n'est pas le premier film de zombies à parler de sentiments. Une réalisation aussi passionnante que Zombie Honeymoon est là pour en témoigner, un film comme Zombie Anonymous tentait également d'aller plus loin que la majorité des films de morts-vivants, et l'on peut encore citer (pour la énième fois, en ce qui me concerne) le petit chef-d'oeuvre qu'est Vote ou crève de John Landis. Il faut également rappeler que Romero a été le premier à chercher à établir des ponts entre humains et zombies, que cela soit dans Day of the Dead, Land of the Dead ou Survival of the Dead. Pour autant, les quelques exemples que l'on peut trouver pèsent peu par rapport à l'ensemble de la production qui propose avant tout, et c'est somme toute assez normal, des zombies mangeurs de chair humaine qu'il convient de dégommer avec ardeur et sans se poser de questions. Je ne m'en plains pas, je constate juste. Et j'attends avec autant d'impatience que tout le monde la sortie de World War Z

 

Warm Bodies se positionne donc sur le terrain émotionnel, sentimental, pour ne pas dire romantique. Mais il y a quelque chose d'autre qui fait une différence : nous ne sommes pas en présence d'une banale histoire d'amour façon Romero et Juliette, le zombie amoureux de la vivante et tout ce qui peut en découler. Nous sommes en présence d'une célébration de l'amour, de ce sentiment qui va déclencher un changement radical dans le coeur et l'âme même du zombie, d'abord chez un individu, puis parmi toute sa communauté. L'amour est ici une chaleur qui va irradier l'ensemble des morts-vivants jusqu'à leur redonner l'envie de se souvenir, d'éprouver, de ressentir, de communiquer, d'aimer et de vivre. Dans cette histoire, un couple seul fait la différence et change le monde. C'est cela que raconte Warm Bodies, et c'est beau. C'est quasiment du Lennon dans le texte.

 

Chose encore plus remarquable, Warm Bodies parvient à traiter tout cela sans jamais tomber dans le larmoyant outrancier ou le mauvais goût caractérisé. De la même manière qu'il ne va jamais chercher des effets humoristiques trop poussés. Il en ressort une oeuvre subtile, modérée mais certainement pas tiède, qui s'assume totalement et ne sombre pas dans la caricature d'elle-même. Certaines scènes sont des moments de bravoure qui se remarquent à peine tant elles sont traitées avec finesse et justesse. Que des zombies puissent renoncer à dévorer une humaine juste parce qu'elle prend la main du garçon mort-vivant qui l'accompagne, un réalisateur quelconque en aurait fait quelque chose de déplorable. Levine en fait une scène chargée d'émotion autant que de sens. Ce réalisateur a du génie.

 

D'autant qu'il convient de saluer l'esthétique même du film, et notamment un traitement de la lumière tout particulier que l'on observait déjà dans Mandy Lane, un jeu des contrastes saisissants et qui tranche avec la mode des teintes crépusculaires et lymphatiques initiée par Twilight et que tant de réalisateurs de films de genre nouvelle-génération se sentent obligés d'adopter de peur de passer pour des ringards. Et l'on écoutera avec plaisir toutes les chansons qui jalonnent le film, plus intéressantes souvent que sa bande-son qui elle, à quelques exceptions près, n'a rien de vraiment captivante.

 

Ce qui m'agace le plus dans le fond, c'est que malgré toutes ces qualités et tous ces éloges, je ne peux pas non plus crier au chef-d'oeuvre. Ne vous méprenez pas : Warm Bodies est un bon film, un très bon film même, et sans doute un excellent film. Bien mené, bien rythmé, bien interprété, bien écrit et bien réalisé. Avec une âme, une intention, une ambition. Mais il lui manque peut-être un petit grain de folie supplémentaire, et probablement une demi-heure sinon une heure de plus. Tout va tellement vite et tout semble se passer si aisément que l'on demeure un peu sur sa faim. Comme si Warm Bodies tenait finalement plus de l'allégorie que du film à proprement parler.


Est-ce une raison pour bouder son plaisir ? Certainement pas. Non seulement c'est une oeuvre à voir, mais je suis convaincu que c'est une oeuvre à revoir, ce que je ne manquerai pas de faire dans les meilleurs délais, ne serait-ce que pour vérifier si mes maigres réticences ne s'estompent pas comme neige au soleil, ainsi que cela arrive quelquefois.  


Et sur ce, je vous laisse. Rrrrrr.

 

 

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